TEMOIGNAGE D’UN LECTEUR DE TERRE-NOUVELLE.FR
Merci !!!
Merci pour tous les témoignages et les encouragements que vous nous envoyez.
Cela nous fait énormément plaisir !!!
Nous voulons vous faire partager ces moments d’émotion, ces moments où nos lecteurs nous parlent d’eux. C’est pourquoi nous avons demandé à Philibert (dont nous avons volontairement changé le nom) de publier son message. Il est d’accord et voici son témoignage. En détails sur Terre-nouvelle.fr.
Nous laissons la parole à un lecteur de Terre-nouvelle.fr.
Un grand merci à « Philibert » qui a tellement raison…
- Témoignage d’un lecteur de Terre-nouvelle.fr
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Bonsoir,
Je me décide à vous écrire, pour vous dire que je trouve très bien ce que vous faites, et surtout que le mode de vie me plaît beaucoup.
Les questions que vous posez dans votre blog sont vraiment cruciales, et on voit que vous êtes allés super loin dans la démarche de survivalisme familial.
Je n’aime pas trop le terme de survivalisme, qui pourrait laisser présager un extrémisme pour les non-initiés, alors que je conçois cela plus comme une façon de vivre telle que je l’ai connu chez mes parents, ou dans leur entourage, il y a bien longtemps.J’ai 42 ans, je suis originaire du Gard.
J’ai grandis en ayant toujours un laguiole ou un opinel dans la poche depuis mon plus jeune âge et en taillant des écorces de pin en forme de petits bateaux pendant les vacances, ou en taillant des sifflets dans du bois de frêne ou de noisetier, en prenant tous les repas avec, en fabriquant des arcs et des flèches avec mon frère, en ayant aussi toujours un morceau de jardin à bécher dans le potager parmi nos « devoirs » familiaux. Et en allant naturellement dans le potager pour chercher des délicieuses tomates pour le midi.
Mes parents ayant vécu un temps dans les Cévennes, les exemples de familles autonomes sur les plans alimentaires et d’approvisionnement en eau sont plus que courant. Des familles autonomes à tel point que aller au supermarché était certes fréquent pour certains, mais pas totalement indispensable pour se nourrir puisque beaucoup préparaient leurs conserves, quant à d’autres perchés plus haut dans les montagnes cévenoles, c’était déjà plus marginal. C’est là que l’on apprend à laver ses légumes dans une bassine et que l’on jette l’eau de lavage dans le potager et non dans l’évier.
Mon père était chasseur et issu d’une famille de bouchers (avant qu’il ne se reconvertisse bien plus tard). Il était normal pendant ma jeunesse de manger du gibier pendant la saison de la chasse, sans que je ne fus obligé moi-même de tremper les doigts dans la viande sanguinolente pour la préparer (chose qui me répugnait d’ailleurs).
Nous avions des animaux à la maison, quelques ruches, nous savions trouver des pignons de pins dans la forêt, manger quelques plantes comestibles quand nous étions gosses (non pas parce que nous avions faim, mais juste parce qu’on trouvait génial de savoir les reconnaître dans la nature), bref, toujours un peu d’activités manuelles, mais c’était là aussi un bonheur que nous ignorions.
Puis en grandissant, la vie m’a amené ailleurs.
Je suis sorti de mon univers de petite agglomération campagnarde, pour aller mener une vie plus urbaine à Grenoble ou à Lyon, (en alternant en fonction de mon humeur), souvent très urbaine, propice aux festivités, à la facilité, et quand je revenais chez moi de temps en temps, je constatais que la coopérative de légumes du village ne marchait plus, que les commerces disparaissaient, que le boulanger ambulant ne passait plus, que nous étions de plus en plus dépendant d’un système centralisé.
Le confort aidant, je ne bricolais plus ma voiture moi-même, notamment l’entretien régulier que je déléguais à un garagiste désormais.
À l’age de 11 ans, j’ai commencé mes premiers travaux pour gagner de l’argent de poche: les vendanges, avec un salaire à partager en 2 puisque je me mettais à une même rangée avec un camarade pour effectuer le rendement d’un adulte.
J’ai appris à tailler la vigne, à la débourgeonner, tout ces trucs qui permettent de gagner un tout petit peu dans ma région, mais au combien nécessaire dans un milieu familial moyennement favorisé.
… Le soucis, quand on grandit de façon un peu juste, c’est que lorsque l’on se lance dans la vie professionnelle, on économise encore un peu au début, mais si on gagne soudainement un peu trop bien sa vie, on bascule vite dans une perversion où l’on essaye de rattraper le temps perdu où l’on a vécu trop de privations : exit le jardin potager, fini le composteur taille XXL réalisé en planches traitées, fini l’abatage et le débitage de bois de chauffage enseigné par un vrai bûcheron, terminé les activités manuelles, on plonge à pieds joints dans un environnement certes sympa mais vraiment superficiel. Les légumes ne sortent que du supermarché, et s’ils ont la bonne couleur, ils ont en revanche perdu le goût, c’est le royaume de Monsanto et des hybrides F1.
Fut un temps encore, nous avions l’habitude de cueillir nos champignons, d’en conserver certains, mais tout cela prit fin le jour où nous avons déménagé pour une vie encore plus urbanisée: Francfort sur le Main, une ville tout juste grande comme Lyon avec certains avantages non négligeables, professionnels, culturels, sécuritaires, favorisant les nombreux espaces verts, mais où la montagne est encore un peu plus loin, les champignons plus durs à trouver, où la chasse est politiquement incorrecte, quant à la pêche… (je ne sais même pas s’il y a des coins), et où les activités campagnardes d’une bonne partie de la population locale se résument à exhiber le week-end la voiture que l’on a soigneusement astiquée le vendredi soir.
Bref, quand les enfants sont petits, on n’y prend pas trop garde. On peut se contenter de les promener dans l’un des nombreux parcs de la ville, et de leur montrer des choses un peu plus campagnardes pendant les vacances (à supposer que ce soit chez les grands parents et encore pas dans un hôtel avec une formule tout compris).
Mais, se balader dans les mêmes parcs en vélo, en roller, faire de la balançoire, tout cela finit aussi par avoir ses limites quand les enfants vous réclament d’aller à la pêche à la ligne et qu’il faut leur expliquer que faute de place, les cannes sont en France dans le grenier des grands-parents, tout comme le matériel de camping avec lequel vous avez passé vos premières vacances, un CDI en poche, alors que les enfants adorent dormir sous la tente, je le sais, j’ai été scout.
Les boîtes de légo toutes prêtes (il y a même plus à réfléchir, les formes sont pré-mâchées) s’entassent à chaque anniversaire, et le politiquement correct que nous avons étés forcés d’ingurgiter nous a tellement retourné la tête, que l’on se demande à partir de quel âge on pourra leur offrir leur premier opinel sans se faire traiter de parents indiques et inconscients.
On finit par passer ses week-ends en mettant le nez dehors, mais sans avoir le sentiment d’avoir réellement accompli quelque chose, on n’aura pas planté un arbre, ni refendu des bûches, ni taillé des arbres fruitiers, ni même tenté de greffer un amandier. Même pas besoin de préparer un pique-nique, il y a toujours un kiosque.
Bref, on est assistés jusqu’à la moelle.
Le plus dur moralement, c’est qu’à la limite, si on ne pensait pas soi-même à cette perte de valeurs, ce serait pas grave, mais quand ce sont les enfants qui sont eux-mêmes demandeurs de ces choses essentielles, il est très frustrant de devoir leur refuser, soit parce qu’en habitant en ville, on n’a plus le matériel faute de place, soit encore, parce qu’on ne peut pas expliquer à un enfant que l’on peut soi-même se bricoler un arc et ses flèches et jouer avec dans un parc public, et ce ne sont là que 2 petits exemples parmi d’autres.
Les murs entre lesquels on habite sont certes très beaux, mais ne contiennent que du superficiel désormais. On imagine un conflit similaire à la Bosnie (conséquent à un changement de pouvoir, ou des résultats électoraux qui déplaisent, ou un embrasement de la population pour une raison X ou Y) et les forces de l’ordre (en trop forte minorité de nos jours) seront bien trop occupées à protéger on s’en doute leurs propres familles, en ville, tout sera plus violent, l’espérance de vie ne sera que de quelques jours. Stocker de la nourriture, apprendre à connaître les antibiotiques, tuer et vider un lapin sans chopper la gerbe, on sait plus faire.
Sans être alarmistes, je trouve votre action pleine de sens, ça me rappelle juste nos mode de vie quand j’étais jeune finalement. Plus encore, je trouve que vous avez de la chance, je vous envie d’avoir fait ce pas vers la liberté.
Ironie du sort: les mondes virtuels des jeux vidéo sont parfois orientés vers des jeux de simulations de vies en communauté où l’on privilégie la culture agricole, l’artisanat et l’échange. Bref, des jeux de simulations pour nous faire revivre la vie de nos parents ou nos grands-parents…
Amicalement
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